L’ENS d’Ulm

  1. Organisation générale de l’école
  2. Les différents types d’étudiants à l’ENS (avec focus sur le mastérien)

 

Ce que j’ai pu constater en entrant à l’ENS d’Ulm, c’est que je n’étais pas la seule à n’absolument pas savoir en quoi consistait l’école. Je vais essayer de t’expliquer comment fonctionne l’école et les différentes manières d’y entrer !

L’ISMAPP

Après avoir passé deux en prépa littéraire, elle présente l’école qu’elle a intégré sur concours : l’ISMAPP, ou Institut Supérieur du Management Politique et Public.

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L’EHESS

Emma, en master 1 d’études politiques à l’EHESS après trois ans de prépa littéraire au lycée Fénelon, te présente l’EHESS et les spécificités de cette école entièrement tournée vers la recherche.

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Organisation générale de l’école

Généralités

L’ENS est une école destinant généralement à la recherche et à l’enseignement, mais elle peut préparer à d’autres métiers (journalisme, communication, arts, ou encore dans la fonction publique ou en entreprise). Elle mélange, dans le même campus, des littéraires et des scientifiques, qui peuvent s’ils le souhaitent, assister à n’importe quel type de cours (tu pourras faire de la « chimie pour tous » si ça te chante). Je parlerai ici du fonctionnement de l’école pour ce qui concerne les littéraires exclusivement.

NB : il y a également un département sciences sociales auquel tu peux accéder depuis une AL (après un M0, cf. plus loin) ou une BL, et un département d’économie.

L’ENS d’Ulm, pour ce qui est des normaliens (nous reviendrons dans la suite sur le statut des mastériens de l’ENS), prévoit un cursus en trois ou quatre ans selon le statut de l’étudiant, durant lequel il doit valider le DENS.

 

Le DENS

Le DENS est le diplôme de l’Ecole normale supérieure. Pour le valider au terme du cursus à l’ENS, le normalien doit remplir plusieurs critères, sur lesquels je vais revenir plus en détails par la suite :

  • Avoir validé un équivalent de licence (la khûbe compte comme L3) et un master de recherche, à l’ENS ou ailleurs ;
  • Avoir validé au moins 72 ECTS dans en plus de la licence et du master, répartis d’une certaine façon ;
  • Avoir validé trois « expériences d’ouverture ».

En gros, si tu arrives en L3, tu dois commencer par valider une L3 en-dehors de l’ENS : l’école n’habilite pas de L3 littéraire. Si tu arrives en M1, tu dois suivre un master à l’école ou à la fac. En parallèle et dans tous les cas, tu dois prendre des cours à l’ENS. Tous ces cours sont au choix et à la carte, mais tu dois au moins valider un cours de langue par an et valider, en tout, au moins 5 cours par an. Tu peux aussi et enfin choisir de faire un M0 si tu arrives après ta L3 : dans ce cas, tous tes cours sont à l’ENS et tu dois en valider au moins 13 dans l’année. Après le M0, tu dois encore faire ton M1 et ton M2.

Attention : tu dois nécessairement faire un master de recherche pour valider le DENS.

Tu dois donc cumuler une L3 ou un master avec les cours de l’ENS. La fac – Paris IV Sorbonne du moins – te permet pour t’organiser de ne pas assister à deux des quatre TD. Néanmoins, tu dois suivre tous les cours et toutes les options prévus par le cursus universitaire.

Au début de l’année, tu dois te rattacher à un département. En général, c’est le même département que celui dans lequel tu fais ton cursus universitaire, mais ce n’est pas absolument obligatoire. Tu choisis également un tuteur qui te conseillera dans l’année et dans l’ensemble de ta scolarité dans le département sélectionné.

Le département choisi conditionne la mention que tu recevras sur ton DENS (mention arts, mention philosophie, etc.). Dans l’ensemble de ta scolarité à l’ENS, tu dois valider au moins 24 ECTS dans ton département de rattachement, en plus des ECTS validés dans le cadre de la licence et du master. Tu dois également valider 24 ECTS dans d’autres départements, et 24 ECTS où tu veux (dans ton département ou ailleurs).

Pour avoir un autre département que ton département de rattachement mentionné sur ton diplôme, tu dois valider 48 ECTS dans ce département au cours de ta scolarité à l’ENS : c’est ce qu’on appelle une mineure.

Enfin, je vais revenir sur les expériences d’ouverture. Il y en a 4 types :

  • Expérience de recherche : organisation d’un séminaire de recherche, participation à un colloque… ;
  • Expérience linguistique et internationale ;
  • Expérience transdisciplinaire : beaucoup sont proposées à l’ENS, comme la participation au séminaire d’actualités critiques ou la conception d’une médiation culturelle au musée Guimet ;
  • Expérience d’ouverture hors les murs de l’ENS : stages, expérience d’enseignement…

C’est en cumulant tout cela que tu obtiendras ton DENS. Pas d’inquiétude cependant : c’est rentrer qui est difficile ; une fois dans l’école, l’objectif n’est absolument plus de trier. Il y a plus de chance de prendre trop de cours pour son propre bien que pas assez pour le diplôme…

 

La vie dans l’école

L’école se divise en trois campus : Ulm (avec plusieurs bâtiments dans la rue, pour les cours scientifiques et littéraires), Jourdan (pour l’économie, la géographie et les sciences sociales) et Montrouge. Tous les campus sont dotés de chambres, dites « thurnes« . 

Il y a pas mal de clubs à l’ENS et le COF (BDE) est très actif. De nombreuses activités sont mises en place et il y a régulièrement des soirées organisées par la K-Fêt au sein de l’école, dont l’entrée est gratuite et les boissons bon marché.

Le cursus du « conscrit » (premier année) commence par de nombreuses activités suivies d’un weekend d’intégration (appelé Méga, il y a beaucoup de jargon à Ulm) dont j’ai de très bons souvenirs et qui te permet de connaître du monde. L’objectif est de ne pas te larguer dans un monde nouveau et de vraiment t’accompagner. Si tu décides d’habiter à l’internat de l’ENS, tu pourras aussi facilement rencontrer du monde.

Certains élèves passent le plus clair de leur temps à l’ENS, d’autres y mettent peu les pieds car ils n’y logent pas et la plupart de leurs cours sont à l’université (en littéraire, c’est sûr que tu ne feras pas ta L3 à l’ENS). Ce sera à toi de voir ce que tu veux et peux faire.

Il y a de grosses différences d’âge à l’ENS car outre les doctorants, tu peux recourir à des « étalements d’études », c’est-à-dire faire des pauses dans ton cursus pour suivre une formation ailleurs, faire un stage ou encore aller à l’étranger, puis revenir prendre des cours à l’ENS. La plupart des élèves passent donc plus de quatre ans à l’école.

Pour plus d’informations, je te renvoie à la Plakette de l’ENS d’Ulm de 2022, c’est-à-dire le fascicule créé par le COF pour expliquer l’école aux conscrits de cette année.

 

La cour aux Ernests, ou Courô, au centre du campus du 45 rue d’Ulm. Photo David Monniaux.

Les différents types d’étudiants à l’ENS

Je vais revenir ici sur trois types d’étudiants à l’ENS – il y en a d’autres, car cette école est tout de même assez complexe, mais ces trois statuts sont les plus fréquents.

L’élève fonctionnaire-stagiaire

L’élève fonctionnaire-stagiaire, ou simplement élève normalien, est un ancien khâgneux (pour ce qui est des littéraires) ayant intégré sur concours. Il peut avoir intégré en khârré, en khûbe ou en bikhâ : il peut donc commencer en L3 ou en master (il n’y a pas d’équivalence M1 pour les bikhâs).

L’élève a un statut de fonctionnaire-stagiaire, ce qui signifie qu’il est payé par l’État : pour parler chiffres, depuis la récente revalorisation des salaires de fonctionnaire, il reçoit une traite mensuelle autour de 1400€ net. Cette traite lui est versée durant les quatre années de sa scolarité. En échange, il s’engage en début de première année à consacrer 10 années à l’État : c’est ce qu’on appelle l’engagement décennal. Les quatre années à l’ENS comptent dans l’engagement décennal, ce qui fait qu’en sortant de l’école, il n’a plus que 6 ans à consacrer à l’État. L’élève normalien peut les valider en étant fonctionnaire national ou international. Tous les ans après sa sortie, il doit expliquer où il en est de cet engagement. S’il ne tient pas cet engagement, il doit rembourser le salaire correspondant à ces 6 années.

L’élève fonctionnaire stagiaire doit valider le DENS (voir première partie).

Je ne te mets pas ici de conseils pour entrer ainsi à l’ENS car une très grande partie des articles de ce site y sont déjà consacrés.

 

L’étudiant-normalien

L’étudiant-normalien a également le statut de normalien, mais pas celui d’élève fonctionnaire-stagiaire. C’est-à-dire qu’il valide également le DENS au terme de sa scolarité, mais qu’il n’est pas payé et ne doit donc pas d’années à l’État.

Dans les départements littéraires, l’étudiant-normalien ne peut être recruté qu’en M1. Il peut être issu de khûbe, de la fac ou d’une autre école. Il est sélectionné en fonction d’un projet de recherche, de ses notes, d’un écrit lié à son département de rattachement et d’un oral où il soutient son projet. Il y a donc, comme pour l’élève, un phase d’admissibilité et une phase d’admission.

Si en théorie l’étudiant est un plus tenu que l’élève de rester dans son département (puisqu’il est entré en fonction d’un projet de recherche), en pratique il est très libre aussi.

Nous compléterons au plus vite cet article avec des conseils d’un étudiant-normalien pour réussir les épreuves d’admissibilité et d’admission.

L’entrée de l’ENS d’Ulm, Guilhem Vellut, CC BY 2.0  <https://creativecommons.org/licenses/by/2.0>, via Wikimedia Commons

L’ISMAPP

Après avoir passé deux en prépa littéraire, elle présente l’école qu’elle a intégré sur concours : l’ISMAPP, ou Institut Supérieur du Management Politique et Public.

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L’EHESS

Emma, en master 1 d’études politiques à l’EHESS après trois ans de prépa littéraire au lycée Fénelon, te présente l’EHESS et les spécificités de cette école entièrement tournée vers la recherche.

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Le mastérien

Le mastérien de l’ENS d’Ulm a été sélectionné pour l’un des masters de l’ENS ou lié à l’ENS : le master ATP (arts), le master d’histoire, un master de littérature, de philo, de sciences cog… Il ne prépare pas le DENS, mais il suit bien les cours de l’ENS.

Comme le normalien étudiant, le mastérien n’est pas payé et ne doit pas 10 années à l’État. Le mastérien, n’ayant pas à valider le DENS, n’est pas appelé « normalien ». Mais il fait bien entendu partie de l’école, il peut assister aux cours disponibles en plus de son master (master parfois assez libre) et à toutes les activités de l’école.

L’élève qui témoigne ici suit le master ATP (Art théorie et pratique) à l’ENS depuis début 2022. Elle ne vient pas d’une khâgne, mais tu peux également accéder aux masters de l’ENS après deux ans de khâgne et un an de fac, ou après une khûbe. Elle te parle de son cursus, avec les « pour » et sans te cacher les « contre » !

« Je suis entrée à partir d’une évaluation de mon dossier, un projet de recherche et deux oraux. J’étais au Collège Universitaire de Sciences Po, avec une majeure Humanités Politiques. En troisième année, j’ai fait un Erasmus à Rome où j’ai pris des cours de théâtre et cinéma à la Sapienza. J’ai choisi ce master car j’avais envie de continuer à approfondir mes connaissances dans ces deux arts. J’ai un peu hésité avec le master d’études théâtrales de Paris III, mais la diversité des cours à l’ENS m’attirait, avec la possibilité de prendre des cours de théâtre, de cinéma, ou de toute autre chose.  Même si je n’étais pas directement dans une formation théâtrale, je pense que mon année d’échange à la Sapienza et un stage dans un théâtre ont aidé à justifier ma candidature pour un master en arts.

Pour mon projet de recherche, j’ai choisi de parler des ateliers de théâtre avec les primo-arrivants en Italie, en étudiant des mises en scène théâtrales et des documentaires. J’étais alors bénévole dans une association, ASINITAS, qui organise des cours de langue et des ateliers de théâtre pour apprendre l’italien. Ces ateliers étaient très riches humainement et cela donnait souvent lieu à de magnifiques spectacles, d’inspiration documentaire.

Après la phase d’admissibilité, deux oraux étaient organisés : un entretien de motivation avec cinq professeurs du département, et un entretien sur le projet de recherche, qui dans mon cas s’est déroulé avec les deux professeurs de théâtre de l’ENS. On m’a dit que dans certains cas, le jury pouvait rester assez froid, mais cela ne préjuge jamais de la réussite d’un oral ! 

J’ai beaucoup redéfini mon sujet de mémoire, puisque j’étudie finalement les ateliers de théâtre en France, ce qui est plus facile pour les observations de terrain qu’étudier le théâtre en Italie. Ma directrice en théâtre est très investie, et nous nous voyons régulièrement pour parler de l’avancée de mes recherches, mais je n’ai vu qu’une fois mon autre directrice. Spécialiste des mouvements de protestation en science politique, elle n’avait pas beaucoup de références à m’indiquer en sociologie de la migration. Cela est un problème majeur à l’ENS : comme il y a très peu de profs, il est difficile de trouver des spécialistes pour un sujet donné.

Les cours sont intéressants, très divers. Par contre, notre master « Arts théorie pratique » se révèle être beaucoup plus théorique que pratique. Cela a déçu beaucoup de mes camarades du master, d’autant plus que nous ne sommes pas autorisés à faire de la recherche-création pour notre mémoire. Le débouché principal du master est censé être la recherche, même si presque personne ne continue en thèse. Cela peut être un problème car nous ne sommes pas beaucoup accompagnés dans notre insertion professionnelle au-delà de la recherche.

Une richesse du master est la grande liberté que nous avons dans le choix de nos cours et de nos activités à l’ENS. La vie associative de l’école est très dynamique et les possibilités de participer à des projets artistiques sont nombreuses. Finalement, la dimension pratique du master ATP peut se situer dans la participation à des projets artistiques non au sein du master, mais avec le théâtre Nicole Loraux, avec l’orchestre ou le film-club.

Si j’ai un conseil à donner pour l’entrée dans ce master ce serait de passer du temps à réfléchir et à construire le projet de recherche, qui est déterminant dans la phase d’admission. Comme ce sont les profs de l’ENS qui font la sélection ET qui dirigent les recherches du master, ils choisissent des sujets qui les intéressent vraiment et qu’ils ont envie d’accompagner pendant deux ans. »